Alors que naissaient les Chevaliers de la Flamme Blanche, en qui je fonde l’espoir de nouveaux Chevaliers, guidés par leurs valeurs propres, indépendants et bienveillants, je voyais l’avenir sous la lueur de l’espoir.

Nous n’étions plus autant que dans l’Ordre des Chevaliers d’Uther. Restaient ceux que je porte le plus à mon coeur: Kenthan, Maitre Cyrno, Dame Eileen, Sire Altred, Galend, et évidemment, le Seigneur Ethann pour porter cet ordre.

Devrais-je avoir de la rancoeur envers ceux qui ne nous ont pas suivi ? Je ne peux m’y résoudre. Avoir de la colère, de la haine, est ce vraiment une solution à toute chose ? Alors que les ombres m’entouraient jadis, je ressentait bien souvent ces sentiments.
Lorsqu’ils m’ont quittés, un fardeau intenable a libéré mes épaules, je ne voudrais en aucun cas porter ce joug de nouveau.

Me lever chaque matin, voyant le visage lumineux de Dame Eileen, sentant la fumée et l’acier de la forge de Maitre Cyrno, observer Sire Altred voltigeant au dessus de moi, et regardant au loin sire Galend s’entrainer avec le Seigneur Ethann. Boire un thé, au pied de la Tour des Mages, voir Kenthan s’assoir près de moi. Tant d’instants qui font mon bien être.

Ca y est ? Ai je atteind la plénitude dans ma vie, celle que l’on cherche parfois toute une vie, sans jamais la trouver ?

Alors que je m’élevais, la réalité d’Azeroth me rappelait pourtant durement au sol
La chute de Dalaran, la disparition de Maitre Cyrno, de Kenthan, autant d’événements qui me rappelaient que le bonheur n’est qu’éphémère, et que notre vie tend à le chercher, toujours.

Apprenant que Kenthan était encore en vie, et retenu captif, je partai en quête de le retrouver.
Seules quelques affaires composaient ma besace. Il me fallait voyager léger, je voulais rapidement arriver sur les lieux des ruines de Dalaran.

Un voyage de plusieurs jours m’attendait, mais j’espérait arriver rapidement sur place.

Un soir, alors que je méditais sous le ciel étoilé, un appel étrange s’emparait de moi, émanant des profondeurs d’un ancien temple oublié, caché dans une vallée reculée de la forêt où je me trouvait. Ce temple, dédié à Elune, la déesse de la lune, n’avait visiblement pas été visité depuis des millénaires.

Poussé par une force mystérieuse, je me mettais en route, guidé par une lumière argentée qui semblait scintiller uniquement pour moi. J’espérais trouver un abri, et ne pas dormir à la belle étoile.

En m’approchant du temple, je remarquais toutefois que la végétation environnante se pliait respectueusement à mon passage, comme si la nature elle-même reconnaissait mon destin.

Je faisais usage de mon bouclier magique de protection, et, bâton à la main, prêt à incanter, j’avançais prudemment.

À l’intérieur du temple, une immense statue d’Elune trônait, entourée de fresques anciennes racontant des histoires oubliées. Au centre de la salle, une fontaine de lumière pulsait doucement, ses eaux argentées émanant une énergie mystique.

Soudain, une voix éthérée résonna dans la pièce, douce et grave à la fois. C’était la voix d’une ancienne Oracle d’Elune, une guide du passé.

– Rewan, t’es tu déjà demandé d’où venaient ces visions saisissantes, dont la première est née dans le regard de Cemra, et que tu n’as cessé de voir, dans les yeux de toutes les personnes qu’il te fallait aider ?

Je regardais dans toutes les directions, ne voyant personne.
La voix semblait provenir de toutes les directions à la fois. Comme si le temple lui même me parlait.

– Qui est ce ? Montre vous ! Hurlais je.

Malgré le mystère entourant cette voix éthérée, je ne me sentait étonnement pas en danger, bien au contraire. A mesure que j’évoluais autour de cette fontaine, mon cœur se réchauffait.
Je me surprenais même à relâcher mon étreinte forte sur mon bâton, à relâcher mes muscles tendus, à réduire mon rythme cardiaque.

– Le temps est venu pour toi d’acquérir un nouveau pouvoir, celui de l’Oracle. Un don rare, octroyé seulement aux élus capables de transcender le monde matériel pour entrer en communion avec les étoiles et les forces mystiques d’Elune.

Je gardais le silence, affairé à analyser cet espace.

– Tu ne crains rien, mon ami. Mais pour mériter ce pouvoir, il te faudra le demander. Tu ne le sais que trop bien: tout acte est vain, si celui à qui il est destiné n’en est pas demandeur. Bois l’eau sacrée de cette fontaine, et ta demande sera exaucée. Crois moi, Rewan, ce pouvoir pour lequel tu a été choisi, et que tu découvre depuis déjà quelques temps, sera de la plus haute importance pour les épreuves qui t’attendent.

La lumière qui éclairait la fontaine semble alors se focaliser sur un bol, posé au cœur de la fontaine. Un bol de pierre, que je n’avais pas vu jusqu’alors.

Quelques filaments dorés semblaient flotter autour de ce bol. Une magie d’une finesse que je n’avais jamais vu jusqu’à présent.
Généralement, la magie, même la plus puissante, est diffuse. Mais celle ci me paraissait très fine, très nette, brillante, sans être éblouissante.

Je m’approchais du bol. En le prenant dans mes mains, ces petits filaments de magie venaient délicatement s’enrouler sur mes bras.

Je pris une gorgée de cette eau. Était ce un acte inconsidéré de ma part ? Oui, de toute évidence.
Mais a y réfléchir, c’était peut être la chose la moins insensée qui se déroulait dans ce temple.

Après avoir bu, j’étais transporté dans une vision intense : je me voyais marcher sur une mer d’étoiles, chacune révélant des fragments du passé, du présent, du futur.

Au loin, une silhouette majestueuse m’observait. C’était Elune elle-même. La déesse ne prononça aucun mot, mais j’entendais pourtant son message.

Elle m’expliqua qu’en devenant Oracle, en acceptant ce don, je serais capable de percevoir les fils du destin. Toutefois, tout acte à un prix : une part de mon esprit serait liée à l’éternité, et mon regard ne serait jamais plus le même.

Je ne percevais pas immédiatement le sens de ces mots. En posant mon regard sur la mer d’étoile sur laquelle j’évoluais, en m’inclinant un peu, je constatais que ces étoiles n’étaient pas des masses d’énergie sphériques, mais plutôt des amas de filaments, enroulés, comme des pelotes de laines. Les mêmes filaments que ceux qui entouraient le bol dans lequel je venais de boire.

Relevant les yeux vers Elune, je n’avais pas le temps de poser ma question, qu’elle y répondait:

– Mon enfant, oui, je t’ai choisi. Non pas parce que tu es unique, car chacun de mes enfants est unique. Toutefois, certains se voient dotés d’un dessein particulier. Tu es né sous de bonnes augures. Cela ne fera pas de ta vie un long fleuve tranquille, tu as déjà pu le constater. Mais cela lui donnera un sens. Un sens qui te dépasse, mais que toi, et une poignée d’autres êtes amenés à arpenter, pour guider vos prochains. Commence ton apprentissage, ne te préoccupe pas du temps qu’il prendra. Car bientôt, tu évolueras hors du temps des êtres vivants.
Tu sais tisser les fils de ton armure. Bientôt ce sont les fils du Temps et du Destin que tu seras amené à tisser. Va, donc. Ton enseignement commence dès maintenant.

De retour dans le monde réel, je sentais une brûlure sur mon front. En le touchant, je réalisais qu’un troisième œil, lumineux et doré, venait d’apparaître. Ce nouvel œil était il le symbole de mon rôle d’Oracle, capable de voir au-delà du voile du temps et de percevoir les vérités cachées ?

Dans ce temple, cette nuit la, je venais de marcher entre les mondes. A la fois prêtre et Oracle, il me fallait acquerrir la sagesse des étoiles dans chaque pas que j’allais faire, guidé par la lumière d’Elune.

Près de moi, je gardais précieusement l’opale de feu de Kenthan, comme pour me rassurer, me souvenir du chemin que j’avais entrepris, et surtout, connaitre son état de santé.